jeudi 26 mars 2009

Noir Express : "Corses toujours" (C. C. X) par Alain Pecunia, Chapitre 26 (suite et fin)

Chapitre 26 (suite et fin)





Un grand silence se fit autour de la table.
À la fois sous le coup de la nouvelle et des effets des vapeurs d’alcool, les six policiers semblèrent sombrer dans de sombres méditations.
Jeanne Collieri se mit debout les mains sur les hanches et rejeta sa tête en arrière.
– Le Président de la République a été sauvé et vous faites la gueule ? tonitrua-t-elle. En plus, on a été aux petits soins avec vous et on vous a évité de faire des conneries… Vous, les hommes, vous n’avez jamais aucune reconnaissance devant le sacrifice des femmes !
Pierre Cavalier avait deviné qui était l’auteur du coup de fil anonyme et de l’embrouille.
Il regarda Antoine puis Gilbert en leur souriant. Puis ses yeux indiquèrent sa tante.
Antoine comprit l’allusion.
– Je t’expliquerai, dit-il à Gilbert qui n’avait pas suivi le fil.
Le commissaire Bellou maugréait dans son coin.
– J’aimerais quand même bien savoir quel est l’enfant de salaud qui a pu passer ce coup de fil anonyme… D’où peut bien venir la fuite ? Et pourquoi tout a foiré…
Puis il se tourna vers Cavalier.
– Je ne comprends pas ce qu’a voulu dire ta tante, dit-il à voix basse.
– Moi non plus, dit Cavalier en souriant. Tu sais comment elle est…
Mais déjà le commissaire René Bellou avait d’autres soucis en tête.
– Bon Dieu ! dit-il en sursautant, faut que je file à la préfecture. Le préfet doit me chercher partout…
Il se leva en titubant légèrement et fit signe à ses subalternes de le suivre. Ce qu’ils semblèrent faire à contrecœur.
– Mais qu’est-ce que je vais bien pouvoir lui raconter qui tienne la route…, l’entendit-on maugréer en prenant congé de Jeanne Collieri, de Laëtitia et des deux « cantinières ».
Il se retourna, le front sombre, en arrivant à la porte de la salle à manger, et s’adressa à Cavalier.
– Pierre, occupe-toi du sous-directeur, s’il te plaît. Je te demande ça comme un service…
Cavalier lui lança un : « Compte sur moi », tout en songeant qu’il n’y avait pas urgence. Que Tomasini ne tarderait pas à être au courant – s’il ne l’était déjà – et appellerait.
Jeanne Collieri trônait toute fiérote à son bout de table et échangeait avec ses copines de brefs regards qui en disaient long.
Son neveu ne se sentait pas le cœur de lui dévoiler que le Président n’avait jamais eu l’intention de mettre les pieds sur l’île de Beauté et qu’elles avaient empêché les mâchoires du piège de se refermer sur Leprot et, par voie de conséquence, sur Laneureuville.
Il songea que cela l’aurait attristée inutilement. Ainsi que ces vieilles dames pour lesquelles il éprouvait de plus en plus de tendresse.



© Alain Pecunia, 2009.
Tous droits réservés.

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