mardi 23 juin 2009

Noir Express : "Sous le faux étendard du Prophète" (C. C. XII), par Alain Pecunia, Chapitre 24

Chapitre 24





Pierre Cavalier renonça à tout tenter pour bloquer l’information du massacre du pavillon des Lilas.
Par son modus operandi, il ne pouvait être relié aux deux autres meurtres de Noël.
Personne n’avait été égorgé dans le pavillon.
Il serait aisé à l’Intérieur de dissocier ces meurtres des précédents.
Ils n’étaient reliés entre eux que pour les initiés. Personne d’autre ne savait, pour l’instant, que les victimes se connaissaient et appartenaient à un même groupuscule. À part leurs meurtriers.
Pour l’instant…
Mais cinq meurtres pour le réveillon et le jour de Noël, et tous concentrés sur Paris et sa proche banlieue, ça allait malgré tout faire désordre dans la crèche de la Nativité.
Son téléphone sonna à ce moment-là, mais Pierre Cavalier s’abstint de décrocher.
Ce devait être le directeur ou le ministre qui venaient d’apprendre le massacre de la famille Collin.
Il préféra s’éclipser discrètement des locaux de la Direction centrale des Renseignements généraux et aller chercher lui-même la clé de l’énigme.
Il se dirigea à pied vers le boulevard Malesherbes et rentra dans la première cabine venue après s’être éloigné d’une bonne centaine de mètres de la rue des Saussaies.
– Allô ?
Il reconnut immédiatement la voix de son informateur.
Janine Bangros l’avait également reconnu.
– Je suis seule, répondit-elle d’une voix angoissée. Il est sorti en début d’après-midi.
– Ce sont eux, n’est-ce pas ?
– Je crois, dit-elle d’une voix hésitante. Enfin, je veux dire que c’était dans leurs projets.
– Bien, je vous remercie. Je voulais être sûr.
– Vous m’avez promis, n’est-ce pas ?
– Oui, je ferai tout mon possible, mentit-il.
Il savait qu’il ne pourrait rien faire pour Roger Bangros. Il avait été trop loin dans le crime et l’horreur.
C’est le mardi 16 septembre que la femme de Roger Bangros s’était présentée spontanément rue des Saussaies.
L’informateur « spontané », comme la plupart, contrairement aux idées reçues.
C’était une jeune femme de trente-cinq ans, son mari en avait trente-huit, qui avait épousé Roger Bangros six ans auparavant. Deux ans avant sa conversion à l’islam, qu’elle avait prise pour une tocade. Elle, la politique, ça ne l’intéressait pas, mais, peu à peu, elle s’était rendu compte que son mari changeait. Ses nouveaux amis avaient une mauvaise influence sur lui. Alors elle voulait le protéger. En dénonçant ses « mauvais amis ».
Elle parla d’un certain Mohammed Bouchad, trente-quatre ans, informaticien, et d’un Mourad Boulaoua, vingt-sept ans, commercial, qui venaient souvent à la maison. Ainsi que de Gérard Collin.
Ils ne parlaient que de soutien à la cause palestinienne et de lutte contre le sionisme. Mais, après le 11 septembre 2001, ils étaient tous devenus comme enragés. Ne rêvant que de suivre les traces de leur héros Ben Laden. D’éliminer les Juifs de France et les incroyants. C’est à ce moment-là qu’ils avaient créé le « Groupe de la Foi » et commencé à parler de guerre sainte, de devoir sacré de tout musulman, etc. Même son mari disait maintenant « nous les Arabes », alors qu’il était de Dunkerque. Et puis il était devenu leur chef, leur « émir », comme disaient Mohammed et Mourad, et se faisait appeler « Oussama ».
Elle demandait seulement, en échange de ses informations, que son mari soit protégé au cas où ses amis le conduiraient à commettre des « bêtises ».
Pierre Cavalier lui avait alors demandé de l’informer régulièrement. C’est ainsi qu’il avait su que Gérard Collin et Roger Bangros avaient eu un différend, qu’ils s’étaient « fâchés », avait dit Janine Bangros.
Roger Bangros et ses acolytes avaient été mis « sous surveillance ». Une surveillance de routine qui ne donnait rien. Comme tant d’autres. Alors, puisque rien ne « bougeait », elle devint de plus en plus distante.
On avait juste repéré des lieux de réunion. Quelques planques. Dont une dans Montreuil. Une ancienne boutique à la devanture murée dans un petit immeuble de trois étages désaffecté et voué à la démolition. Elle avait attiré leur attention car Roger Bangros s’y rendait seul.



© Alain Pecunia, 2009.
Tous droits réservés.


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