Chapitre 10
Isabelle Cavalier était crevée.
Couchée à deux heures du matin, Philippine était venue les réveiller à sept heures, tout excitée, pour leur dire que le « papa Noël » était venu déposer ses cadeaux au pied du sapin.
Mais il y eut vite des pleurs car le « papa Noël » n’avait rien prévu pour Titi, le chat.
– Méchant, papa Noël.
Pierre Cavalier eut droit à un regard courroucé de sa femme.
– Tu aurais pu y penser, non ? T’avais que ça à faire ! siffla-t-elle entre ses dents.
Pour Isabelle, le boulot était une chose, la famille une autre.
Pierre fit profil bas. Il savait qu’il n’aurait pas le dernier mot chez lui et que ses nouvelles responsabilités semi-clandestines ou officieuses* à la tête du « Service » pesaient guère eu égard au chagrin de la petite et du cadeau de Noël du chat.
Il tenta de se rattraper en dressant la table mais dut demander de l’aide pour placer le septième couvert. Le regrettant immédiatement car sa femme le rejeta dans les cordes en lui rappelant que le septième couvert étant celui de sa mère à lui, ce n’était nullement son problème.
– Débrouille-toi. Sois grand garçon, pour une fois ! lui jeta-t-elle goguenarde.
Il lui dit que, quand même, elle était de mauvaise foi.
– Écoute, lui rétorqua-t-elle sèchement. J’ai deux meurtres merdiques sur les bras, je n’ai pas fermé l’œil de la nuit, ta mère s’est invitée au dernier moment et, en plus, je vais avoir mes règles – alors, tu te tiens à carreau. OK ?
Pierre Cavalier battit sagement en retraite dans le salon-salle à manger et, comme par miracle, il trouva immédiatement la solution pour son septième couvert.
Lorsque la sonnette retentit, Isabelle était au comble de l’énervement.
Pierre alla ouvrir au lieutenant Gilbert Lenoir des Stups et à sa fiancée.
Il était douze heures quarante-cinq.
Quelques minutes plus tard, ce furent Philippe Dumontar et Patrice Dutour, dit « Euh-Euh ». Les deux pièces rapportées de la famille, en quelque sorte.
« Phil » Dumontar, agrégé de lettres et prof en fin de carrière dans une institution privée prestigieuse, ex-serial killer – mais c’était son petit secret – et éminent spécialiste de Racine et Corneille, occasionnellement « auxiliaire » de police, était le père de substitution d’Isabelle et, par voie de conséquence, le « grand-père » adoré de Philippine**.
Quant à Patrice Dutour, vingt-trois ans, dit « Euh-Euh » car c’était là son seul vocabulaire qu’il déclinait néanmoins savamment, ex-meurtrier par amour et sens de la justice immanente – mais c’était également son petit secret, partagé avec un connaisseur, Philippe Dumontar –, son statut « familial » oscillait entre celui de neveu pour le couple Cavalier et celui de tonton pour Philippine***.
En tous les cas, quoique pièces rapportées, Isabelle et Pierre Cavalier les considéraient comme membres à part entière de cette famille singulière qu’ils formaient et dans laquelle Nicole Puytrac, la mère de Pierre, faisait, elle, figure d’intruse.
Elle arriva la dernière, à une heure quinze, alors qu’Isabelle se débattait avec trois bouquets de fleurs pour deux vases.
– Ça tombe bien, ma chérie, dit d’emblée sa belle-mère d’un ton acidulé en la voyant se débattre. Heureusement que je n’ai pas apporté de fleurs !
Une brusque impulsion meurtrière saisit Isabelle quand Nicole Puytrac se précipita sur sa petite-fille en lui tendant un sachet de chocolats pralinés.
– Et toi, ma chérie, heureusement que ta mammie a pensé aux chocolats, sinon personne n’y aurait pensé !
Évidemment, les autres avaient pensé à des jeux pour enfant de trois-quatre ans et à des peluches.
Isabelle Cavalier était crevée.
Couchée à deux heures du matin, Philippine était venue les réveiller à sept heures, tout excitée, pour leur dire que le « papa Noël » était venu déposer ses cadeaux au pied du sapin.
Mais il y eut vite des pleurs car le « papa Noël » n’avait rien prévu pour Titi, le chat.
– Méchant, papa Noël.
Pierre Cavalier eut droit à un regard courroucé de sa femme.
– Tu aurais pu y penser, non ? T’avais que ça à faire ! siffla-t-elle entre ses dents.
Pour Isabelle, le boulot était une chose, la famille une autre.
Pierre fit profil bas. Il savait qu’il n’aurait pas le dernier mot chez lui et que ses nouvelles responsabilités semi-clandestines ou officieuses* à la tête du « Service » pesaient guère eu égard au chagrin de la petite et du cadeau de Noël du chat.
Il tenta de se rattraper en dressant la table mais dut demander de l’aide pour placer le septième couvert. Le regrettant immédiatement car sa femme le rejeta dans les cordes en lui rappelant que le septième couvert étant celui de sa mère à lui, ce n’était nullement son problème.
– Débrouille-toi. Sois grand garçon, pour une fois ! lui jeta-t-elle goguenarde.
Il lui dit que, quand même, elle était de mauvaise foi.
– Écoute, lui rétorqua-t-elle sèchement. J’ai deux meurtres merdiques sur les bras, je n’ai pas fermé l’œil de la nuit, ta mère s’est invitée au dernier moment et, en plus, je vais avoir mes règles – alors, tu te tiens à carreau. OK ?
Pierre Cavalier battit sagement en retraite dans le salon-salle à manger et, comme par miracle, il trouva immédiatement la solution pour son septième couvert.
Lorsque la sonnette retentit, Isabelle était au comble de l’énervement.
Pierre alla ouvrir au lieutenant Gilbert Lenoir des Stups et à sa fiancée.
Il était douze heures quarante-cinq.
Quelques minutes plus tard, ce furent Philippe Dumontar et Patrice Dutour, dit « Euh-Euh ». Les deux pièces rapportées de la famille, en quelque sorte.
« Phil » Dumontar, agrégé de lettres et prof en fin de carrière dans une institution privée prestigieuse, ex-serial killer – mais c’était son petit secret – et éminent spécialiste de Racine et Corneille, occasionnellement « auxiliaire » de police, était le père de substitution d’Isabelle et, par voie de conséquence, le « grand-père » adoré de Philippine**.
Quant à Patrice Dutour, vingt-trois ans, dit « Euh-Euh » car c’était là son seul vocabulaire qu’il déclinait néanmoins savamment, ex-meurtrier par amour et sens de la justice immanente – mais c’était également son petit secret, partagé avec un connaisseur, Philippe Dumontar –, son statut « familial » oscillait entre celui de neveu pour le couple Cavalier et celui de tonton pour Philippine***.
En tous les cas, quoique pièces rapportées, Isabelle et Pierre Cavalier les considéraient comme membres à part entière de cette famille singulière qu’ils formaient et dans laquelle Nicole Puytrac, la mère de Pierre, faisait, elle, figure d’intruse.
Elle arriva la dernière, à une heure quinze, alors qu’Isabelle se débattait avec trois bouquets de fleurs pour deux vases.
– Ça tombe bien, ma chérie, dit d’emblée sa belle-mère d’un ton acidulé en la voyant se débattre. Heureusement que je n’ai pas apporté de fleurs !
Une brusque impulsion meurtrière saisit Isabelle quand Nicole Puytrac se précipita sur sa petite-fille en lui tendant un sachet de chocolats pralinés.
– Et toi, ma chérie, heureusement que ta mammie a pensé aux chocolats, sinon personne n’y aurait pensé !
Évidemment, les autres avaient pensé à des jeux pour enfant de trois-quatre ans et à des peluches.
* Voir Corses toujours.
** Voir Sous le signe du rosaire.
*** Voir Euh-Euh !
© Alain Pecunia, 2009.
Tous droits réservés.
© Alain Pecunia, 2009.
Tous droits réservés.
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