Chapitre 3 (suite et fin)
Sans lâcher son stylo, le capitaine délaissa son carnet de notes, croisa ses mains en posant ses avant-bras sur la table, et planta un regard froid dans celui de Chantal Plantin qui se déroba en baissant légèrement la tête.
– Madame Plantin, je ne crois pas à votre version des faits, dit-elle le plus calmement du monde. Mais alors, pas du tout.
– Mais…, commença sa cliente.
– Je crois, madame Plantin, la coupa-t-elle sur le même ton monocorde, que vous avez assassiné votre propre fille.
L’accusation type qui fait horreur à toute mère, sans exception. Et que même une mère criminelle ne peut admettre ni avouer face à une autre femme.
Isabelle Cavalier vit Chantal Plantin perdre pied, s’étouffer d’indignation.
– Mais ce serait monstrueux ! C’est du délire… Comment aurais-je pu tuer ma propre enfant ?…
Elle hurlait à présent. Bondissant de sa chaise. Se mettant à marcher de long en large dans l’espace étroit. Frissonnant et serrant ses bras autour de sa poitrine.
Isabelle Cavalier savait que ce n’était pas l’indignation qui la faisait frémir ainsi, mais la haine et la fureur qui la submergeaient et qu’elle avait dû mal à contenir devant cette femme officier de police qui « osait » remettre en cause sa version des faits que le commandant, la veille au soir, avait si facilement enregistrée et acceptée.
Un homme finit toujours par croire ce que dit une femme avec assurance. Une femme, non.
Le capitaine ne s’était pas levée et n’avait pas changé d’attitude.
Cavalier intima l’ordre à Mme Plantin de se rasseoir. D’un ton sans réplique.
Ajoutant aussitôt :
– J’ignore les circonstances dans lesquelles vous l’avez tuée, mais je sais comment. Avec le couteau de chasse que vous avez acheté vous-même, madame Plantin !
Pour le couteau, c’était un coup de bluff. Mais sans indics et sans coups de bluff, il n’y aurait plus de police.
Le capitaine Cavalier vit sa cliente tomber en transes sur le sol. Poussant des cris et des gémissements divers entrecoupés de longs sanglots.
Qui alertèrent les collègues à l’extérieur de la pièce qui ouvrirent brièvement la porte pour dire : « Oh ! la la » et courir aviser la hiérarchie. Qui se matérialisa en la personne du commissaire principal Derosier. Lequel se mit à pousser immédiatement des hauts cris qui couvrirent momentanément ceux de Chantal Plantin.
Devant un capitaine Cavalier qui n’avait toujours pas bougé et conservait un calme olympien qui eut pour effet d’énerver encore plus son supérieur.
– Mais il faut faire quelque chose… Oh ! la la !… Elle a peut-être une crise d’épilepsie !… Appelez le toubib, vous autres, au lieu de bayer aux corneilles ! ordonna-t-il aux deux officiers qui l’avaient suivi dans la pièce. Cavalier, il faut que je vous parle ! Vous allez trop loin… Et le juge, nom de Dieu ! Ça va nous annuler la procédure...
Cavalier ne bougea toujours pas. Le capitaine s’amusait de voir des « hommes » se laisser prendre à la grande scène du V d’une parfaite comédienne.
– Calmez-vous, monsieur, ce n’est rien, dit-elle doucement.
– Comment ça, ce n’est rien ? fit le commissaire en s’agenouillant au côté de Mme Plantin. Ça va aller, madame… Le médecin va vite arriver…
Chantal Plantin redoubla ses gémissements et ses sanglots.
– Ce n’est rien. C’est de la comédie, monsieur, insista le capitaine. Elle vient de reconnaître avoir acheté le couteau de chasse…
Encore du bluff. Qui eut pour effet de calmer immédiatement le commissaire.
– Pas possible ! fit-il en se redressant sous le choc de la nouvelle. Mais alors, Cavalier… vous aviez vu juste… ? Pas possible ! Ah ! la salope !
– Monsieur ! le réprimanda le capitaine.
– Oui, excusez-moi, dit, penaud, le commissaire. Mais attendons quand même le toubib avant de reprendre…
Le médecin ne tarda pas et son examen, qui ne dura que cinq minutes, confirma les dires du capitaine.
– Bien, reprenez, capitaine. Moi, je vais téléphoner au juge pour l’aviser de la tournure que vient de prendre l’enquête… Elle va cracher la… oui, excusez-moi…, dit le commissaire en refermant la porte.
© Alain Pecunia, 2008.
Tous droits réservés.
Sans lâcher son stylo, le capitaine délaissa son carnet de notes, croisa ses mains en posant ses avant-bras sur la table, et planta un regard froid dans celui de Chantal Plantin qui se déroba en baissant légèrement la tête.
– Madame Plantin, je ne crois pas à votre version des faits, dit-elle le plus calmement du monde. Mais alors, pas du tout.
– Mais…, commença sa cliente.
– Je crois, madame Plantin, la coupa-t-elle sur le même ton monocorde, que vous avez assassiné votre propre fille.
L’accusation type qui fait horreur à toute mère, sans exception. Et que même une mère criminelle ne peut admettre ni avouer face à une autre femme.
Isabelle Cavalier vit Chantal Plantin perdre pied, s’étouffer d’indignation.
– Mais ce serait monstrueux ! C’est du délire… Comment aurais-je pu tuer ma propre enfant ?…
Elle hurlait à présent. Bondissant de sa chaise. Se mettant à marcher de long en large dans l’espace étroit. Frissonnant et serrant ses bras autour de sa poitrine.
Isabelle Cavalier savait que ce n’était pas l’indignation qui la faisait frémir ainsi, mais la haine et la fureur qui la submergeaient et qu’elle avait dû mal à contenir devant cette femme officier de police qui « osait » remettre en cause sa version des faits que le commandant, la veille au soir, avait si facilement enregistrée et acceptée.
Un homme finit toujours par croire ce que dit une femme avec assurance. Une femme, non.
Le capitaine ne s’était pas levée et n’avait pas changé d’attitude.
Cavalier intima l’ordre à Mme Plantin de se rasseoir. D’un ton sans réplique.
Ajoutant aussitôt :
– J’ignore les circonstances dans lesquelles vous l’avez tuée, mais je sais comment. Avec le couteau de chasse que vous avez acheté vous-même, madame Plantin !
Pour le couteau, c’était un coup de bluff. Mais sans indics et sans coups de bluff, il n’y aurait plus de police.
Le capitaine Cavalier vit sa cliente tomber en transes sur le sol. Poussant des cris et des gémissements divers entrecoupés de longs sanglots.
Qui alertèrent les collègues à l’extérieur de la pièce qui ouvrirent brièvement la porte pour dire : « Oh ! la la » et courir aviser la hiérarchie. Qui se matérialisa en la personne du commissaire principal Derosier. Lequel se mit à pousser immédiatement des hauts cris qui couvrirent momentanément ceux de Chantal Plantin.
Devant un capitaine Cavalier qui n’avait toujours pas bougé et conservait un calme olympien qui eut pour effet d’énerver encore plus son supérieur.
– Mais il faut faire quelque chose… Oh ! la la !… Elle a peut-être une crise d’épilepsie !… Appelez le toubib, vous autres, au lieu de bayer aux corneilles ! ordonna-t-il aux deux officiers qui l’avaient suivi dans la pièce. Cavalier, il faut que je vous parle ! Vous allez trop loin… Et le juge, nom de Dieu ! Ça va nous annuler la procédure...
Cavalier ne bougea toujours pas. Le capitaine s’amusait de voir des « hommes » se laisser prendre à la grande scène du V d’une parfaite comédienne.
– Calmez-vous, monsieur, ce n’est rien, dit-elle doucement.
– Comment ça, ce n’est rien ? fit le commissaire en s’agenouillant au côté de Mme Plantin. Ça va aller, madame… Le médecin va vite arriver…
Chantal Plantin redoubla ses gémissements et ses sanglots.
– Ce n’est rien. C’est de la comédie, monsieur, insista le capitaine. Elle vient de reconnaître avoir acheté le couteau de chasse…
Encore du bluff. Qui eut pour effet de calmer immédiatement le commissaire.
– Pas possible ! fit-il en se redressant sous le choc de la nouvelle. Mais alors, Cavalier… vous aviez vu juste… ? Pas possible ! Ah ! la salope !
– Monsieur ! le réprimanda le capitaine.
– Oui, excusez-moi, dit, penaud, le commissaire. Mais attendons quand même le toubib avant de reprendre…
Le médecin ne tarda pas et son examen, qui ne dura que cinq minutes, confirma les dires du capitaine.
– Bien, reprenez, capitaine. Moi, je vais téléphoner au juge pour l’aviser de la tournure que vient de prendre l’enquête… Elle va cracher la… oui, excusez-moi…, dit le commissaire en refermant la porte.
© Alain Pecunia, 2008.
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