samedi 9 octobre 2010

Noir Express : "Une putain d'histoire" (C. C. XVI) par Alain Pecunia, Chapitre 17

Chapitre 17





Jacques-Henri Bellou était paisiblement assis dans l’unique fauteuil. Comme s’il l’attendait et était sur le point de sortir vu qu’il avait enfilé son blouson.
– Ben dis donc, elles ont un sacré bagou, tes deux thons ! lâcha Clovis faussement jovial en pénétrant dans la pièce, histoire de mettre Bellou en confiance.
– Raconte, ça m’amuse.
Le ton de sa voix était froid. Clovis sentit son assurance titubée.
– Je suis désolé, Bellou, mais tu ne peux pas rester ici. Tu comprends ?
Bellou hocha la tête.
– Tu as un point de chute ? demanda Clovis, mais il manquait de conviction.
« Normal, se dit Jacques-Henri, puisqu’il a décidé de me liquider. Bah ! après tout, je peux lui dire, ça le mettra en confiance. »
Bellou se leva lentement et alla vers la fenêtre, tournant le dos à Clovis.
– Mon vieux a une baraque à Pornic. Je peux y aller quelque temps. Il me doit bien ça vu qu’il ne s’est guère occupé de moi.
Clovis se dit que c’était le moment ou jamais. Il se pencha vers le bar pour l’ouvrir. Il planquait toujours son arme de service à l’intérieur.
Jacques-Henri Bellou se retourna à ce moment-là.
– Figure-toi, dit-il jovial, que ce con est commissaire à Nantes. C’est drôle, non ?
Eusèbe Clovis ne trouvait pas son arme.
– C’est peut-être ça que tu cherches ?
L’arme était pointée sur lui mais Bellou se tenait à distance. Même avec une bonne détente il ne pourrait le désarmer.
– Que veux-tu, dis Jacques-Henri, c’est toi ou moi… Allez, on va descendre chez les filles…
Durant la descente des deux étages, Eusèbe Clovis pria les mânes de ses ancêtres qu’un locataire quelconque se trouve dans l’escalier, même un chien ou un chat. Mais les citoyens, c’est comme la police, ils sont jamais là quand on a besoin d’eux, songea-t-il amèrement en s’efforçant de penser au soleil et à la mer des Antilles.
Bellou ouvrit la porte de l’appartement avec son double et conduisit Clovis directement dans la chambre des filles.
Il lui ordonna de s’allonger sur le lit puis lui tendit un foulard qui traînait sur le dos d’une chaise pour qu’il se bâillonne lui-même.
Ensuite, il lui lia les poings et les pieds avec le tissu d’une robe qui avait été oubliée dans le placard.
Il alla farfouiller dans la cuisine et revint avec une paire de ciseaux.
Eusèbe Clovis ouvrit des yeux exorbités de douleur et de terreur et perdit connaissance lorsqu’il vit la paire de ciseaux dépasser de son propre abdomen.
– Désolé, marsouin, dit Bellou en prenant un air faussement navré.


© Alain Pecunia, 2010.
Tous droits réservés.

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