mardi 21 avril 2009

Noir Express : "Sur le quai" (C. C. XI) par Alain Pecunia, Chapitre 10

Chapitre 10





En fin d’après-midi de ce même jour, Alexandre Caillard descendit les marches de l’escalier du Palais de Justice en maugréant.
Il venait de perdre une plaidoirie qu’un débutant eût remportée haut la main.
Le président lui avait même jeté un regard consterné.
Laneureuville l’obsédait, phagocytait ses pensées.
Il consulta une nouvelle fois sa montre-bracelet.
Dix-sept heures dix.
Il avait rendez-vous à dix-huit heures trente avec le commandant Pierre Cavalier. Au 11, rue des Saussaies. Le siège de la Direction centrale des Renseignements généraux.
Alexandre Caillard eût préféré un lieu de rendez-vous plus discret, mais le commandant avait fait la sourde oreille à sa demande de rencontre « discrète » lorsqu’il lui avait téléphoné.
À quatorze heures, en arrivant au Palais, il s’était décidé à appeler un ancien patron de la Direction. Un des « frères » de sa loge. L’actuel vénérable depuis le suicide de François Cavalier.
Une loge bien particulière, qui regroupait les principaux membres du « clan Cavalier ». Les « têtes », seulement.
Leur conversation fut brève et sibylline.
– Règle ça avec son fils, lui avait simplement répondu son interlocuteur après l’avoir écouté.
Alexandre Caillard fut étonné.
Le seul fils qu’il connût de François Cavalier était un éminent orthopédiste qui semblait à mille lieues des arcanes du « Service ».
– Mais non. L’autre. Celui qui vient de prendre la succession du « Vieux ».
– Appelle-le de ma part. J’ai eu l’occasion de le rencontrer il y a une dizaine de jours.
Le commandant Cavalier avait été affable mais distant quand il l’avait appelé.
À présent qu’il se trouvait assis en face de lui, il le trouvait tout aussi poli mais encore plus distant.
À peine s’il lui avait serré la main quand il s’était présenté comme un vieil ami, « très vieil ami de votre père que j’ai très bien connu ».
Il aurait peut-être dû se montrer moins condescendant devant ce blanc-bec qui semblait susceptible.
Dès qu’il avait précisé, tout sourire, qu’il avait été « un de ses collaborateurs les plus proches », l’autre s’était raidi.
– Notre ami commun a dû vous dire…, commença-t-il en se demandant si le vénérable n’était pas devenu sénile en l’aiguillant sur ce Cavalier-là.
Qui le coupa sèchement.
– La personne à laquelle vous faites allusion est une simple connaissance et un ancien responsable de la maison à présent à la retraite. Mais que puis-je pour vous concrètement ?


© Alain Pecunia, 2009.
Tous droits réservés.

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