mardi 26 août 2008

Noir Express : "Cadavres dans le blockhaus" (C. C. IV) par Alain Pecunia, Chapitre 6

Chapitre 6





La villa de Christine était une de ces constructions des années cinquante-soixante qui parsemaient les communes de la côte de Pornic à Saint-Brévin-les-Pins-l’Océan.
On était en Loire-Atlantique et le modèle obligé avait été le « style basque ». Impossible de construire alors une villa si elle n’était pas basque. Au pays de Retz, entre les Vendéens et les Bretons.
Un perron de quelques marches en façade avec sa porte-fenêtre. Un toit en longueur à tuiles et à deux pans. Un pan court et un pan long. À gauche ou à droite. Au choix. Cent mètres carrés habitables au sol environ. Un grenier avec son œil-de-bœuf. Théoriquement aménageable. Mais, en général, c’était le garage qui se retrouvait aménagé au fil du temps. C’était d’ailleurs prévu par le maçon dès le départ. Les volets jaunes ou marrons ou blancs ou bleus.
Parmi les pins, c’était joli. Ça avait fini par faire le charme de la région.
Moi, ça me plaisait. Je me serais bien vu finir mes jours là. De plus en plus avec mon entrée dans la cinquantaine. Mais sans Christine.
J’étais venu la première fois il y avait onze ans. La première année de notre rencontre. Alors que je n’étais encore que son amant. Avec son mari, bien sûr. C’est d’ailleurs lui qui m’avait initié à la pêche à pied : moules, berniques, crevettes, étrilles. Au haveneau. On y passait des heures tandis que Christine se faisait bronzer en string au pied du poste de secours des CRS-maîtres nageurs du port qui en attrapaient des cernes de la zyeuter de si près avec leurs jumelles de marine.
Ensuite, une fois mariés, nous y étions venus une quinzaine par an autour du 15 août, seule période où j’acceptais de déléguer mon affaire à « mon cher Jean ». L’enfoiré.
Dès mon arrivée à la mi-mai, j’étais retourné chaque jour aux crevettes selon les horaires de marée. J’y retrouvais mon enfance. Me sentant redevenir pur et simple. Loin des turpitudes de Christine la sorcière.
Pendant ce temps, elle, je l’envoyais en mission de reconnaissance. Après tout, c’était elle qui avait l’expérience. Moi, je n’amenais que la notabilité du commerçant respectable.
Puis, le soir, nous allions dans les restaurants et les bars qu’elle avait repérés et qui étaient susceptibles d’accueillir notre business.
Ça ne dura d’ailleurs qu’une dizaine de jours. C’était juste pour endormir Christine.
En rentrant, le soir, je l’encourageais à sniffer une dernière ligne, juste avant le dodo.
Elle était venue avec son cabriolet et moi avec ma familiale.
Le vendredi 30 mai, elle me dit qu’elle avait envie de faire du shopping à La Baule. Je lui proposai de la retrouver vers dix-neuf heures à la pointe Saint-Gildas pour dîner au restaurant face à l’Océan.
Je pouvais compter sur elle pour être en retard.
Il n’y avait plus personne qui traînait autour des blockhaus quand elle arriva à huit heures moins le quart.
Je lui avais demandé de me retrouver près du blockhaus le plus proche du parking. Je voulais lui montrer une cache super.
Je m’étais glissé dans le blockhaus dès que je l’avais vue garer son cabriolet sur le parking du restaurant.
Quand elle arriva à hauteur de l’embrasure de la pièce, je l’interpellai et elle enjamba le rebord pour me rejoindre.
– T’as pas envie ? lui dis-je.
Je vis à son regard qu’elle avait par mal sniffé et que ça lui était indifférent.
Mais elle avait un point faible. Son sexe.
Quand elle se refusait – c’était l’exception, mais ça pouvait arriver –, il suffisait de lui plaquer la main sur le pubis pour qu’elle s’abandonne aussitôt. Ce que je fis, lui ôtant sa robe en un tour de main après qu’elle eut commencé à fléchir les genoux.
– Ferme les yeux et ouvre la bouche, lui dis-je.
Une fellation à l’aveugle, elle adorait ça.
Elle dut croire à je ne sais quel jeu quand je lui enfournai le godemiché en latex dans la bouche. Bien profond. Que j’avais bourré de coke et dont j’avais agrandi suffisamment l’orifice pour qu’elle en avale rapidement une bonne quantité. Dix doses que j’avais mises. Piquées sur sa réserve.
Je la maintins fermement.
Elle hoqueta, étouffa, se débattit faiblement, le visage mouillé de larmes et barbouillé de coke. Pour devenir rapidement une poupée inerte émettant un faible râle. Que j’abandonnai pour rejoindre ma voiture cinquante mètres plus loin.
Je passai par Préfailles pour rejoindre la route Bleue. Trente minutes plus tard, je rentrais la voiture dans le garage.
Alentour, chacun était devant sa télé.


© Alain Pecunia, 2008.
Tous droits réservés.

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