mercredi 3 septembre 2008

Noir Express : "Cadavres dans le blockhaus" (C. C. IV) par Alain Pecunia, Chapitre 12

Chapitre 12





Nous avons terminé le repas cul et chemise et copains comme cochons. Comme quoi il ne faut jamais préjuger ni des gens ni des choses.
Il proposa de s’installer à la villa quelques jours pour tenter de pénétrer l’énigme.
– Ça me rappellera des souvenirs ! dit-il peu élégamment.
Mais c’est vrai qu’il y avait passé des vacances avec Christine avant qu’elle m’épouse et que je les avais même accompagnés en tant qu’ami de la famille. Mais quel con j’avais été et qu’est-ce qu’ils avaient dû se foutre de ma gueule !
Nous fûmes de retour à Saint-Michel, avec nos véhicules respectifs, vers dix-sept heures.
Les coups de téléphone anonymes recommencèrent dans la soirée. Nous décidâmes, au troisième, de débrancher carrément la prise téléphonique. Nous ne nous servirions que de nos portables.
J’appelai Jean pour le prévenir.
– Ça s’est bien passé ? demanda-t-il.
– Oui, aucun problème.
– Et Christine, ça va ?
– Bien sûr.
– Je voudrais lui parler.
– Elle est en vadrouille, dis-je sans avoir à mentir.
– Ah ! N’oublie pas de lui donner le bonjour, hein ?
Promesse de ne pas y manquer, etc.
Je me tournai vers mon nouveau partenaire.
– Je n’ai pas parlé à Jean de la disparition de Christine. Mais il va finir par se douter de quelque chose. Il faudra bétonner une explication pour qu’il avale sa disparition. Ils étaient assez proches.
– Ne t’inquiète pas, Jean n’est qu’un subalterne. Il saura où est son intérêt. Au besoin, je lui filerai la pétoche pour qu’il se tienne tranquille, dit Lionel.
Je me sentis rassuré.
Nous avons passé le reste de la soirée en conjectures. Au final, nous ne voyions pas d’autres possibles malfaisants que des businessmen déjà installés dans le coin et sur les plates-bandes desquelles j’aurais marché avec Christine au cours de notre prospection.
Je lui avouai que ladite prospection n’avait été qu’un prétexte pour attirer Christine dans le coin et l’éliminer.
– Oui, me dit-il, mais elle, elle a peut-être pris le truc au sérieux et mis les pieds dans le plat d’un autre. C’est la seule explication rationnelle. T’as été suivi et on t’a piqué le corps.
– Mais pourquoi ?
– Pour te le ressortir si tu ne décampes pas. Ils te tiennent comme ça. C’est une sorte de message.
C’était le bon sens même.
– Il faut décamper ou les affronter, reprit-il.
Ça me plaisait moins. Moi, ce que je voulais, c’était juste savoir où avait bien pu atterrir le corps de Christine.
– Mais on ne les connaît pas. On ne sait même rien sur eux. C’est un peu comme si on décidait d’affronter des fantômes, dis-je pour le faire pencher vers la solution du repli stratégique. C’est une aiguille dans une botte de foin.
Il me tapota l’épaule.
– Bien vu, me complimenta-t-il. Et l’aiguille, on va la faire sortir de la botte de foin !
Ça me plaisait de moins en moins. Mais il trouva un argument de poids.
– Tant que nous n’aurons pas récupéré Christine, ils resteront une menace potentielle. Laissons-les venir à nous. Etablissons le dialogue et faisons-nous restituer Christine.
– Mais qu’est-ce qu’on en fera après ? Surtout qu’elle ne doit plus être tellement présentable !
– Ce que tu aurais dû faire. La dissoudre à l’acide pour qu’elle nous fasse plus chier même morte.
Là, je ne pouvais que partager son point de vue.
Nous décidâmes donc de rester jusqu’au lundi suivant, le 23 juin, dernier délai. Lionel pensait que, de toute façon, puisque nous avions coupé le téléphone, ils ne tarderaient pas à se manifester. Je ne pouvais que lui faire confiance. Le pro, c’était lui.
Mais, une fois réglé tout ce tintouin, il faudrait bien que je finisse par me décider à l’éliminer. L’envie de me tirer au plus vite de cet univers dangereux de la drogue me reprenait. Et, lui vivant, je l’aurais toujours sur le dos. J’en avais juste besoin temporairement. Le temps de stopper la vadrouille de la salope.


© Alain Pecunia, 2008.
Tous droits réservés.

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