mardi 29 juillet 2008

Noir Express : "National, toujours !" (C. C. II) par Alain Pecunia, Chapitre 9

Chapitre 9





Jean Ferniti fit part de sa décision à Albert Papinski en cheminant ce samedi midi jusqu’à Chez P’tit Louis pour l’apéro.
Albert sembla désappointé sur le moment, mais le lendemain matin, empruntant le même chemin que la veille, il dut convenir que Jean avait bien senti les choses. Comme toujours.
La surveillance policière était voyante à l’extérieur de la cité avec son car de CRS à chacune des trois entrées et on repérait vite les fouineurs qui flânaient dans ses allées l’air de rien alors qu’il n’y avait que des flics pour flâner ici.
Jean pensait, lui, au vendredi à venir. Se demandant s’il ne faudrait pas mieux choisir une autre victime. Car peut-être que les flics iraient interroger les voisins de la famille, et, lui, il était juste celui d’en dessous.
Bien sûr, ils avaient repéré, depuis trois mois qu’ils étaient engagés dans leur mission rédemptrice, d’autres victimes possibles. Mais les conditions n’étaient pas aussi idéales que pour celles qu’ils avaient choisies d’exécuter en premier. Il y avait des risques et des aléas.
« Dommage que le rouquin n’habite pas la cité ! » se dit-il. Mais il dut convenir que c’était stupide. Pour frapper les esprits, il fallait que ce soit des femmes, et plutôt des jeunes et des mignonnes que des vieilles et plus baisables.
Mais il n’arrivait pas à se sortir ce maudit Breton des méninges. C’était sûr qu’il attendait pour lui piquer sa place. Alors pourquoi ne pas profiter de l’élan pris pour s’en débarrasser ? Ça pourrait occuper la police ailleurs.
Il fallait qu’il en parle à son Titi sur-le-champ.
S’il pensait comme ça au Breton, que ça en virait quasiment à l’obsession, il devait y avoir une raison, un sens caché. Et seul le Titi savait dévoiler les sens cachés.
– J’ai des choses à voir, dit-il mystérieusement à son compère. On se voit demain soir Chez P’tit Louis.
Et il le planta là, remontant vite les allées de la cité du Bonheur et grimpant les escaliers quatre à quatre jusqu’à son deux-pièces cuisine du troisième étage.
Il tapota la paroi du bocal pour attirer l’attention du Titi.
– Faut que je te parle ! lui dit-il péremptoire.
Pour Titi, poisson rouge boulimique, tapotage sur son bocal équivalait bouffe. Sûr qu’il allait écouter !
– J’ai un problème…, commença Jean Ferniti.
L’exposé fut un peu long et il s’emmêla parfois dans l’écheveau des options possibles.
Mais la réponse du Titi lui parut évidente. Ça resterait un crime d’Arabes. Il se l’appropria même en s’écriant : « Eurêka ! »
Tout à son excitation, il en oublia de nourrir le poisson rouge qui, dépité, se mit à tourner furieusement dans son bocal.



© Alain Pecunia, 2008.
Tous droits réservés.

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