lundi 27 septembre 2010

Noir Express : "Une putain d'histoire" (C. C. XVI) par Alain Pecunia, Chapitre 2

Chapitre 2





– Mais qu’est-ce qu’on va en faire ? dit Zoé en reprenant la route de Cormeilles.
– Ce qu’on avait décidé, répondit sèchement sa frangine.
– Mais les gendarmes nous ont vues avec lui ? objecta Zoé de nouveau inquiète.
Chloé haussa les épaules.
– Réfléchis un peu au lieu de paniquer. Qui ont-ils vu ? Nous deux, c’est tout. Lui, ils n’ont même pas aperçu son visage.
Zoé convint que sa sœur avait raison. Comme presque toujours. Ce qui l’agaça.
– Ouais, dit-elle, mais ils feront le lien avec nous quand ils retrouveront son corps.
– Suffit qu’ils ne le retrouvent pas, rétorqua Chloé.
– Facile à dire !
« Elle n’a pas tort », se dit Chloé tout en passant en revue les éventuelles solutions à leur problème telles qu’elles lui venaient à l’esprit.
Le noyer ? La mer rejette les corps un jour ou l’autre.
Le découper en morceaux ? Et après ? De toute façon, elle n’imaginait pas sa sœur l’assistant dans la découpe.
Zoé la coupa dans ses réflexions à ce moment précis, alors qu’elles traversaient Bonneville-la-Loubet.
– Dis, si on le découpait ?
Chloé en resta bouche bée, puis se ressaisit.
– Et après, qu’est-ce qu’on fait des morceaux ?
– Ben, on achète un clébard qui bouffe bien, genre molosse, et on le nourrit avec ! répondit la cadette en haussant les épaules d’évidence.
« Pourquoi pas ? » se dit Chloé tout en continuant de passer en revue les autres solutions. Les clebs, c’était pas son truc. Bien sûr, il suffisait d’aller chercher un couple de rapaces à la SPA et de les leur ramener une fois la besogne achevée. Ni vu ni connu.
Sinon, il y avait la dissolution garantie cent pour cent à l’acide. Mais pas facile à se procurer et elles n’avaient pas de baignoire, rien qu’une cabine de douche.
Un puits abandonné qu’il suffirait de combler ensuite ? Mais le corps serait toujours là, et les puits, même abandonnés, ça doit bien être répertoriés quelque part. Et les gendarmes devaient connaître le coup.
Le balancer dans une tourbière du marais Vernier ? Oui, mais avec tout le tourisme nature, les randonneurs et les chasseurs, l’incognito n’était pas garanti. Et puis il fallait connaître le bon coin.
« Putain ! comment faire disparaître un corps ? » se dit-elle en s’énervant alors que sa sœur s’engageait dans Pont-l’Evêque.
Au rond-point direction Deauville, celle-ci lui demanda :
– Qu’est-ce qu’on fait, alors ?
– Pour l’instant, on le ramène à la maison.
– Faudra pas que ça dure, sinon il va devenir dingue.
Dingue ? Oui, elle avait raison, mais elle ne voulait pas agir à la légère, elle avait besoin de temps pour réfléchir.


© Alain Pecunia, 2010.
Tous droits réservés.

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