vendredi 11 décembre 2009

Noir Express : "Sous le signe du rosaire (Le retour)" (C. C. XIII) par Alain Pecunia, Chapitre 28

Chapitre 28




Le vendredi matin, Harry Godino fut arrêté à huit heures trente à l’aéroport Roissy – Charle-de-Gaulle.
Il cherchait à s’embarquer pour une destination lointaine. Ce qui n’était pas très intelligent pour un ex-flic ayant travaillé de longues années à la police des frontières au sein de ce même aéroport.
Harry Godino avait une forte somme d’argent en liquide sur lui en billets de cinq cents euros. – Deuxième stupidité.
Ses anciens collègues se firent un plaisir de l’arrêter et de le remettre au capitaine Cavalier. – Il avait « démissionné » de la police pour avoir été surpris en train de négocier un avantage « en nature » avec une mineure kosovare en situation irrégulière, et il semblait être coutumier du fait.
Isabelle Cavalier lui mit le marché en main dès son arrivée au Quai des Orfèvres.
– Vous préférez me faire des aveux spontanés ou préférez-vous attendre les résultats de l’analyse ADN et de la comparaison de votre sperme avec celui retrouvé dans le vagin de Julie Bernard et d’Angeline de Saint-Fort ? L’un des deux est sûrement le vôtre, précisa Cavalier.
Godino ayant été flic, il savait que ça pouvait faire la différence et lui permettre de sortir au bout de vingt ans. Il en avait quarante-cinq et ça pouvait le tenter. Mais on en voyait aussi qui préféraient crever en taule plutôt que de finir SDF ou en hospice.
À sa surprise, Harry Godino se mit à rire. Il avait l’air de se foutre d’elle.
– Écoutez, capitaine, c’est pas avec la comparaison des spermes que vous me confondrez ! Les filles, je ne les ai pas violées ni couché avec. Pas une seule fois je les ai touchées, je vous jure !
– Je vous crois, dit le capitaine qui se remettait de sa surprise, on m’a dit que ce n’était pas votre truc.
Godino fronça les sourcils d’étonnement et encaissa le coup.
– Bon, vous renoncez donc aux aveux spontanés, constata Isabelle Cavalier. C’est votre choix et c’est aussi votre droit.
Elle lui adressa un large sourire et tapota la pile de procès-verbaux placée devant elle.
– J’ai là les confessions spontanées de tous vos amis – excepté, je dois le reconnaître, celle de votre « employeur » et complice Bernard Bonnot…
L’ex-flic encaissa ce deuxième coup, mais Cavalier discerna une légère inquiétude dans son regard.
Elle s’empara des premiers feuillets – ceux concernant la « confession » de Mme de Saint-Fort.
– Celle-ci, c’est celle de votre ami et complice Matthieu Toussaint, lieutenant à la Criminelle et ex-flic depuis son arrestation dans la nuit de mercredi à jeudi à Strasbourg alors qu’il s’apprêtait à assassiner un témoin capital, Mlle Christelle de Saint-Fort… Mais vous étiez, je crois, au courant de son voyage, d’après ce qu’il m’a dit…
Isabelle Cavalier se demanda si elle n’en faisait pas un peu trop. L’ennui, avec le bluff, surtout lorsque l’on a un certain talent pour cet art, c’est qu’il faut savoir se limiter. Mais Godino ne sourcilla pas. Il devait donc être au courant.
– Bref, je vais vous lire sa déposition – excusez-moi d’avance, ce sera un peu long car il a été très exhaustif sur le rôle de chacun –, et ensuite vous me direz ce que vous en pensez. S’il y a désaccords, vous connaissez la musique. Je vous confronterai.
Isabelle Cavalier constata que la belle assurance de l’ex-flic était largement entamée.
Isabelle marqua une pause et parcourut le premier feuillet du regard.
– Bon, dit-elle, je vous passe l’état civil de Toussaint… Voici donc ce qu’il dit…
– Arrêtez, je préfère faire des aveux spontanés. J’ai pas envie de me faire entuber par cet enfoiré… Il a d’ailleurs dû oublier des choses qui ne le feront pas sortir de sitôt !


© Alain Pecunia, 2009.
Tous droits réservés.

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