lundi 8 septembre 2008

Noir Express : "Cadavres dans le blockhaus" (C. C. IV) par Alain Pecunia, Chapitre 16

Chapitre 16





Ce ne fut pas un juge, mais une juge.
Sur le moment, j’ai presque eu envie de lui dire la vérité. Comment tout avait commencé. Mais c’était peut-être long. Elle avait pas l’air d’avoir trop le temps.
L’affaire était claire. Il y avait d’autres dossiers en attente. Bien plus importants que ce truc minable.
– Vous ne voulez toujours par parler ? me demanda-t-elle le nez dans le rapport de gendarmerie et les dépositions des témoins.
Après des « Oh ! la la ! », des « Pas possible », « Incroyable », des hochements de tête, des soupirs. Et même un « Jésus Marie ! ». Faut dire qu’on était à la limite de la Vendée.
J’ai essayé de rassembler mes idées avant de lui répondre quelque chose qui tienne la route, qui ne l’affole pas trop – quelque chose de rationnel et de raisonnable, quoi !
– Notez, greffier, que le prévenu ne veut pas parler ! dit-elle avant que j’aie pu ouvrir la bouche et toujours le nez dans la paperasse qui me concernait.
Je parvins à faire un ultime effort.
– Je…, commençai-je.
– Oui ?
Sans lever les yeux et d’un ton revêche.
– Je suis pas pédé…
Regard plein de désolation de l’avocat commis d’office.
Haut-le-corps de la juge qui leva enfin le nez, mais c’était en direction du type dans un coin.
– Greffier, n’inscrivez rien !
Puis elle demanda aux deux gendarmes de m’emmener.
C’était tout. Elle avait hâte de se débarrasser de moi. Comme s’il y avait quelque chose de répugnant en moi. Mais je ne lui en voulais pas. Je la comprenais même. De toute façon, le truc du godemiché pour tuer ma femme, je suis sûr que ça lui aurait pas plu.



© Alain Pecunia, 2008.
Tous droits réservés.

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