Chapitre 14
Le samedi 3 janvier, aucune information pertinente n’était encore remontée des diverses filatures et surveillance.
Les Bernard, avenue de Suffren, recevaient des visites de condoléances. De même la famille de Saint-Fort.
Mme Cangros, née Éloïse Pouldieu du Guen, resta toute la journée auprès de sa cousine née Pouldieu du Fouët – Mme de Saint-Fort.
Rien de plus naturel pour ces familles aux liens de sang si étroits.
Les Claron se manifestèrent également près des Saint-Fort. Peut-être les connaissaient-ils par l’intermédiaire de leur fille Sabrina, l’aînée du groupe d’amies qu’elle formait avec Corinne Cangros et Angeline de Saint-Fort. Mais aucune des deux amies « survivantes » ne sortit ce jour-là de chez elle ni n’accompagna ses parents chez les Saint-Fort.
Philippe-Henri Dumontar ne sortit pas non plus de la journée de son appartement.
Phil, lui, était surveillé à la fois par le lieutenant Toussaint de la Crim et par lieutenant Gilbert Lenoir, qui surveillait les deux.
Isabelle Cavalier tournait en rond autour de la table du salon-salle à manger, ce qui commençait à énerver les deux hommes assis sur le canapé et en train de jouer une interminable partie d’échecs. Pierre et le commissaire Antoine.
Elle, ce qui l’exaspérait, c’est qu’ils pussent rester impassibles alors que tant de choses étaient en jeu. Attendant tranquillement assis sur leur cul que la solution de l’énigme leur tombe toute seule du ciel. Et qu’elle-même était à bout de nerfs et ne supportait déjà plus l’attente de ce week-end qui lui semblait être le plus long de son existence.
De temps en temps, elle arrêtait son manège et se rendait dans la chambre de sa fille pour voir si tout se passait bien.
La baby-sitter qu’elle avait fait venir pour s’occuper de Philippine ne lui répondait même plus quand elle lui demandait pour l’énième fois de la journée : « Ça va ? »
Elle se contentait de hocher la tête en continuant de regarder des dessins animés avec la petite.
En revenant cette fois-ci dans le salon, elle se planta à hauteur du jeu d’échecs, entre les deux hommes.
– Et Euh-Euh ? fit-elle.
– Quoi, Euh-euh ? répondit Pierre sans lever les yeux du jeu.
– Il n’est même pas venu me présenter ses vœux…
– Et alors ? dit Pierre en haussant les épaules.
– Hé ! il a peut-être pas envie de finir puceau ! fit Antoine goguenard.
Isabelle Cavalier se détourna en haussant les épaules. « Qu’est-ce que ça peut être cons, des mecs, parfois ! »
Elle traîna un fauteuil devant la fenêtre et s’y assit en leur tournant ostensiblement le dos.
Elle rejeta la tête en arrière et croisa les bras sur sa poitrine. Comme à l’école. Sa position favorite pour se concentrer.
Un assassin ? deux assassins ?
Si l’assassin ou l’un des assassins n’était pas Phil, peut-être fallait-il le rechercher dans l’entourage des familles des victimes. Mais les Saint-Fort et les Bernard ne semblaient pas se connaître. Les deux affaires étaient liées sans être liées. C’est ce qui agaçait Isabelle Cavalier. À moins qu’un fil invisible…
Isabelle se sentait sans ressource.
– Mais il y a bien un assassin au moins, bordel !
Elle s’était exprimée à haute voix.
– Tu dis ? fit son mari sans se détourner de son jeu.
– Rien, je réfléchis toute seule.
– Alors, fais-le en silence, s’il te plaît. Tu nous déconcentres.
Isabelle Cavalier faillit bondir de fureur.
Elle se contint en respirant profondément et lentement puis se leva d’un mouvement félin, tel une chatte délaissant le moelleux d’un coussin pour partir en chasse.
Isabelle se dirigea d’abord vers la porte du salon pour la fermer et vint s’agenouiller devant le plateau d’échecs.
– Ça a l’air vachement intéressant, votre jeu, les mecs ? dit-elle d’une voix enjôleuse et en balayant d’un revers de la main les pièces du plateau avant qu’ils aient pu se douter de quoi que ce soit.
La soirée fut pourrie.
Les deux mecs ne cessèrent de lui faire la gueule.
Isabelle, elle, était radieuse.
Il n’y avait pas de raison que ce samedi soit seulement pourri pour elle.
© Alain Pecunia, 2009.
Tous droits réservés.
Le samedi 3 janvier, aucune information pertinente n’était encore remontée des diverses filatures et surveillance.
Les Bernard, avenue de Suffren, recevaient des visites de condoléances. De même la famille de Saint-Fort.
Mme Cangros, née Éloïse Pouldieu du Guen, resta toute la journée auprès de sa cousine née Pouldieu du Fouët – Mme de Saint-Fort.
Rien de plus naturel pour ces familles aux liens de sang si étroits.
Les Claron se manifestèrent également près des Saint-Fort. Peut-être les connaissaient-ils par l’intermédiaire de leur fille Sabrina, l’aînée du groupe d’amies qu’elle formait avec Corinne Cangros et Angeline de Saint-Fort. Mais aucune des deux amies « survivantes » ne sortit ce jour-là de chez elle ni n’accompagna ses parents chez les Saint-Fort.
Philippe-Henri Dumontar ne sortit pas non plus de la journée de son appartement.
Phil, lui, était surveillé à la fois par le lieutenant Toussaint de la Crim et par lieutenant Gilbert Lenoir, qui surveillait les deux.
Isabelle Cavalier tournait en rond autour de la table du salon-salle à manger, ce qui commençait à énerver les deux hommes assis sur le canapé et en train de jouer une interminable partie d’échecs. Pierre et le commissaire Antoine.
Elle, ce qui l’exaspérait, c’est qu’ils pussent rester impassibles alors que tant de choses étaient en jeu. Attendant tranquillement assis sur leur cul que la solution de l’énigme leur tombe toute seule du ciel. Et qu’elle-même était à bout de nerfs et ne supportait déjà plus l’attente de ce week-end qui lui semblait être le plus long de son existence.
De temps en temps, elle arrêtait son manège et se rendait dans la chambre de sa fille pour voir si tout se passait bien.
La baby-sitter qu’elle avait fait venir pour s’occuper de Philippine ne lui répondait même plus quand elle lui demandait pour l’énième fois de la journée : « Ça va ? »
Elle se contentait de hocher la tête en continuant de regarder des dessins animés avec la petite.
En revenant cette fois-ci dans le salon, elle se planta à hauteur du jeu d’échecs, entre les deux hommes.
– Et Euh-Euh ? fit-elle.
– Quoi, Euh-euh ? répondit Pierre sans lever les yeux du jeu.
– Il n’est même pas venu me présenter ses vœux…
– Et alors ? dit Pierre en haussant les épaules.
– Hé ! il a peut-être pas envie de finir puceau ! fit Antoine goguenard.
Isabelle Cavalier se détourna en haussant les épaules. « Qu’est-ce que ça peut être cons, des mecs, parfois ! »
Elle traîna un fauteuil devant la fenêtre et s’y assit en leur tournant ostensiblement le dos.
Elle rejeta la tête en arrière et croisa les bras sur sa poitrine. Comme à l’école. Sa position favorite pour se concentrer.
Un assassin ? deux assassins ?
Si l’assassin ou l’un des assassins n’était pas Phil, peut-être fallait-il le rechercher dans l’entourage des familles des victimes. Mais les Saint-Fort et les Bernard ne semblaient pas se connaître. Les deux affaires étaient liées sans être liées. C’est ce qui agaçait Isabelle Cavalier. À moins qu’un fil invisible…
Isabelle se sentait sans ressource.
– Mais il y a bien un assassin au moins, bordel !
Elle s’était exprimée à haute voix.
– Tu dis ? fit son mari sans se détourner de son jeu.
– Rien, je réfléchis toute seule.
– Alors, fais-le en silence, s’il te plaît. Tu nous déconcentres.
Isabelle Cavalier faillit bondir de fureur.
Elle se contint en respirant profondément et lentement puis se leva d’un mouvement félin, tel une chatte délaissant le moelleux d’un coussin pour partir en chasse.
Isabelle se dirigea d’abord vers la porte du salon pour la fermer et vint s’agenouiller devant le plateau d’échecs.
– Ça a l’air vachement intéressant, votre jeu, les mecs ? dit-elle d’une voix enjôleuse et en balayant d’un revers de la main les pièces du plateau avant qu’ils aient pu se douter de quoi que ce soit.
La soirée fut pourrie.
Les deux mecs ne cessèrent de lui faire la gueule.
Isabelle, elle, était radieuse.
Il n’y avait pas de raison que ce samedi soit seulement pourri pour elle.
© Alain Pecunia, 2009.
Tous droits réservés.
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