Chapitre 25
Le TGV de Christelle arriva en gare de Strasbourg a vingt-deux heures cinquante-deux.
Elle prit sa voiture laissée sur le parking et arriva près de chez elle vers vingt-trois heures trente.
Elle aperçut les gyrophares d’une voiture premiers secours des pompiers et de trois véhicules de police.
Une heure plus tôt, les abords du petit immeuble où elle habitait avaient été sécurisés. Le capitaine responsable du groupe, après avoir constaté qu’il n’y avait pas de code d’accès et que quiconque pouvait pénétrer librement, avait demandé au gardien de lui localiser les fenêtres de l’appartement de Christelle de Saint-Fort sur la façade.
Les volets des deux fenêtres du deux-pièces au troisième étage, sur la gauche, n’étaient pas fermés.
Dix minutes plus tard, le capitaine crut discerner un furtif mouvement de rideau.
Il releva à nouveau la tête vers les fenêtres.
Il eut tort. Ou raison. En tout cas, son attitude parut suspecte à Matthieu Toussaint qui avait pénétré par effraction discrète dans l’appartement de la jeune femme peu après vingt et une heures et qui s’impatientait, hésitant encore entre la défénestration suicidaire ou l’électrocution accidentelle dans le bain.
L’attitude du capitaine mit fin à son dilemme. Pour l’instant, il préférait s’éclipser discrètement et ne pas se faire prendre bêtement.
Il sortit de l’appartement silencieusement et se trouva nez à nez avec une jeune femme aux cheveux blonds mi-courts et à la mâchoire crispée qu’il regarda en souriant. Le lieutenant Handam qui avait été postée sur le palier et qui venait juste d’entendre dans l’oreillette de sa radio le capitaine annoncer à chacun que la cible se trouvait peut-être dans l’appartement.
Elle avait l’avantage, puisqu’elle avait commencé à dégainer son arme aussitôt.
– Les mains en l’air ! ordonna-t-elle en le visant à la tête quasiment à bout portant.
Matthieu Toussaint était déconcerté mais il avait toujours méprisé les femmes, et encore plus les fliquettes. En plus, celle-ci était une jeunette et une bleue. Ça se voyait à sa façon de tenir son revolver. Il pouvait tenter de la désarmer. Elle hésiterait à tirer.
Il commença à lever ses mains très lentement. Sans brusquerie. Comme au ralenti.
– Je le fixe ! ajouta-t-elle la voix tendue, parlant dans son micro, avec un rien de tremblement qui n’échappa pas au lieutenant Toussaint.
Il fixait toujours la fliquette en souriant d’un sourire enjôleur qui masquait une haine profonde.
Ses mains étaient à présent à hauteur de la poitrine.
Oui, il pouvait la désarmer. Il ne songeait même pas à la suite des événements. Il était obnubilé par le désir de donner une bonne leçon à cette garce.
Il entendait le bruit de la cavalcade dans l’escalier en arrière-plan.
Il fallait qu’il se décide. Il se décida.
Il mourut sans comprendre comment cette conne avait pu déceler son intention et prévenir son geste.
La salope, elle avait été meilleure que lui, le champion de sa promotion aux sports de combat, le plus fort et le plus rapide de toute la Crim pour désarmer un gus à mains nues et à bout portant…
Le lieutenant Handam tenait son arme abaissée à présent à deux mains, tentant de réprimer leur tremblement nerveux.
C’était son premier tué.
Après la fouille du corps, le capitaine Wolff lui tendit avec une moue de dégoût la photo trouvée dans le portefeuille de leur « client » particulier.
La photo représentait une jeune fille nue au regard vide allongée entre une femme et un homme d’une quarantaine d’années également nus. La femme regardait l’objectif en brandissant un énorme godemiché et l’homme se faisait masturber par la jeune fille, en lui tenant le poignet.
© Alain Pecunia, 2009.
Tous droits réservés.
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